IRREMPLACABLE MAURICE BEJART
Le tour du monde commence... L'Egypte est d'abord évoquée, mélange de force et de raffinement sur une chanson d'Oum Kalsoum. Nous sommes assis au deuxième rang, tout près de la scène. Je peux voir la musculature parfaite des danseurs, la sueur perle sur les corps. Un léger rictus de souffrance témoigne de l'effort fourni sous le sourire affiché. Quelle beauté, quelle puissance ! Une élégante et gracieuse danseuse évoque maintenant la Grèce, douceur et tendresse sur une mélopée de Théodorakis. Puis nous voici à Venise sur une musique de Vivaldi. La troupe fait une halte à Vienne et revisite le "beau Danube bleu". Le voyage se poursuit dans un déploiement de couleurs, celles de l'Inde, jaune safran, rouge... puis de la Chine. Pour faire le lien entre les différents tableaux, un personnage récurrent, le voyageur, m'évoque Béjart dans ses jeunes années. Petit passage par le pôle sur une musique Tahitienne. Des pingouins dansent en faisant rouler un énorme globe terrestre. N'est ce pas là l'expression des doutes que Béjart nourrissait quant à l'avenir de notre planète et à la problématique du réchauffement climatique ? Mystère.
Petit clin d'oeil à Hamlet où Béjart étincela naguère (le danseur joue avec un crâne) sans oublier Gil Roman, tout de noir vêtu, comme pour porter le deuil, grâve et intense dans emprunt à "Tod in Wien"... La tournée planétaire s'achève par les Etats Unis avec Duke Ellington, puis le carnaval de Rio, multicolore et endiablé interrompu par un coup de tonnerre qui, je suppose, évoque la disparition du chorégraphe. Le décors se décontruit et plonge le plateau dans le noir. C'est déjà la fin. Le temps a passé très vite. La lumière se rallume, les artistes saluent, semblant hésiter entre rire et larmes sous les ovations du public qui se lève. C'est émouvant, troublant. C'est la troupe a présent qui nous applaudit, un pingouin les rejoint et déclenche des rires dans la salle...
Y aura t-il un après Béjart ? Ce dernier spectacle est-il une oeuvre testament ? Des questions se posent. Gil Roman, le fils spirituel de Béjart qui a repris le direction de la compagnie à achevé la scénographie du ballet mais a renoncé a chorégraphier le dernier tableau qui devait voir les voyageurs revenir en terre Sénégalaise sur une musique de Youssou N'Dour.
Pour moi, ce dernier ballet est porteur d'un message de paix et de fraternité. Je voulais rendre hommage à cet homme exceptionnel qui a su mettre l'art dela danse à la portée de tous. Je ne peux me résoudre à l'adieu, il restera pour toujours dans ma mémoire.